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1871 La commune de Paris, chronique locale d'un drame national - 12 - Clap de fin

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1871

12 Clap de fin

 

 

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La semaine sanglante

 

Thiers passe à l'offensive

Les dirigeants de la Commune font preuve d'un optimisme, ou d'un aveuglement, désarmant. Ignorant la menace bien réelle d'une reprise en main par le gouvernement, confiants dans le bien-fondé de leur politique, insensibles aux défections croissantes dans leur camp, ils poursuivent sans état d'âme leur œuvre de refondation de la société. Ils en oublient le b.a.-ba de toute action révolutionnaire, à savoir disposer d'une force armée prête à soutenir leur action. Celle qui aurait vocation à jouer ce rôle, la Garde nationale, est laissée « dans un tel état d'anarchie qu'il s'avère impossible de mobiliser efficacement la majeure partie de ses ressources en hommes et en matériel. De jour en jour, leurs positions et leurs moyens s'affaiblissent entre le 5 avril et le 22 mai ». Quand l'heure sonnera de la mobiliser, il sera trop tard.

Car Thiers et le maréchal de Mac-Mahon, commandant en chef de l'armée de Versailles, ont décidé de mettre fin au désordre parisien en lançant leurs troupes sur la capitale. Dès le 11 avril, une partie des communes périphériques sont

reprises, avec leurs bastions. Mais contrairement à l'occupation par les Prussiens six mois auparavant, l'objectif n'est pas d'entamer un nouveau siège de longue durée, mais bien d'en faire des points d'appui pour lancer l'offensive sur la ville rebelle.

L'offensive est lancée le 10 mai. Dès le premier jour, le fort d'Issy tombe. Les autres se rendent les uns après les autres. Le 20 mai, l'armée versaillaise peut faire donner l'artillerie depuis les hauteurs du Mont-Valérien, d'Issy, de Vanves. On dirait que l'histoire se répète. Tout l'ouest de Paris est touché. Dès lors l'affaire est entendue. Le 21, les troupes versaillaises entrent par l'ouest et le sud. Quand le jour se lève le 22 au matin, l'École militaire et le Trocadéro sont occupés depuis la veille, sans coup férir. Les combats de rue peuvent commencer, les exécutions sommaires aussi.

 

Les barricades

La Commune tente de réagir. Un appel aux armes est proclamé par voie d'affichage : « Que Paris se hérisse de barricades ! Car Paris, avec ses barricades, est inexpugnable ! ». Des barricades, il va en pousser un peu partout, surtout évidemment dans les quartiers populaires du nord et de l'est. Dans les quartiers de l'ouest, classés comme « bourgeois », la population acclame les soldats versaillais comme des libérateurs, ce qui n'empêche pas des barricades de se dresser ici et là.

Dans le 6ème arrondissement, on en trouve rue Vavin, rue Bréa. L'une des plus importantes est construite sur le carrefour de la Croix-Rouge. Ce carrefour, en 1871, n'avait pas l'aspect qu'il présente aujourd'hui. Les rues du Vieux-Colombier, du Four et de Sèvres n'avaient pas encore été élargies dans le cadre du plan haussmannien dont la réalisation s'est poursuivie jusqu'à la fin du 19ème siècle. C'était alors un faisceau de six rues étroites qui convergeaient à cet endroit, et il était facile de l'obstruer à l'aide de meubles, de charrettes, de pavés, et d'ustensiles de toutes sortes. On formait ainsi un rempart efficace derrière lequel on pouvait aussi positionner canons et fusils pour organiser la riposte. D'une manière générale les quartiers du Panthéon et du Luxembourg sont bien défendus.

 

L'inexorable avancée des Versaillais

Le 23 le général Ernest Courtot de Cissey, commandant le 2ème corps d'armée dont le périmètre d'intervention englobe l'ensemble de la rive gauche, entreprend un mouvement d'encerclement par le sud des 5ème et 6ème arrondissements. Les barricades de la Croix-Rouge et de la rue de Rennes tiennent bon. Quelques communards jusqu'au-boutistes font entrer un fourgon chargé de bidons de pétrole dans la cour du palais du Luxembourg, toujours converti en ambulance : ils attendent un ordre d'y mettre le feu.

 

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Ernest Courtot de Cissey, gravure C. Chevalier

 

À l'aube du 24, ils tentent de faire évacuer le palais. Mais l'ambulance a accueilli beaucoup de communards, qui y sont bien soignés et ne l'entendent pas de la même oreille. Ils envoient un des leurs, un capitaine, plaider la cause du palais à l'Hôtel de Ville. Mission réussie : l'ordre d'incendier n'arrivera jamais. Mais le palais est désormais aux mains des insurgés.

À défaut du palais du Luxembourg, les combattants parisiens, finalement acculés sous la pression des Versaillais, pratiquent la politique de la terre brûlée : avant de se replier, ils mettent le feu à leurs barricades comme aux habitations voisines. Le carrefour de la Croix-Rouge n'est plus qu'un immense brasier, tout comme la rue Vavin.

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Le carrefour de la Croix-Rouge en mai 1871. A gauche, la rue de Sèvres, vers la droite la rue du Dragon.Photo Parismuséescollections

 

D'ailleurs les incendies ravagent le centre de Paris : Hôtel de Ville, Palais de Justice, préfecture de Police. Il devient urgent de reprendre le contrôle du palais du Luxembourg. Les troupes du général François Paturel, assisté du lieutenant (et futur général de la Grande Guerre) Arthur Boucher s'avancent par les rues d'Assas et Notre-Dame-des-Champs, tandis que le général Émile Marius Bruat, capitaine vaisseau affecté à l'armée de la Loire en janvier 1871, s'approche avec ses fusiliers marins par les rues de Seine et de Tournon. Les communards reculent vers le boulevard Saint-Michel.

Au passage, ils mettent le feu à la poudrière installées dans le jardin du Luxembourg. L'explosion est terrible, les rues environnantes sont couvertes de débris.

Mais les Versaillais progressent, reprenant le contrôle de la mairie du 6ème arrondissement, puis celui du palais du Luxembourg, qui est désormais à l'abri du feu et où le général de Cissey établit aussitôt son quartier général.

L'heure de la répression va sonner.

 

La répression

 

Les exécutions sommaires

On le sait, la chasse aux Communards fut féroce et peu de ceux (et celles, car il y eut nombre de femmes et même d'enfants) qui tombèrent aux mains des Versaillais furent épargnés. Certes, des ordres furent donnés pour ne sévir que contre des insurgés pris les armes à la main, mais il ne fut pas facile de les faire appliquer par des soldats prêts à en découdre.

On a du mal à dénombrer le nombre des exécutions sommaires. On fusille un peu partout. Comme à peu près toujours en pareille circonstance, les dénonciations vont bon train, et on en profite à l'occasion pour se débarrasser d'un ennemi personnel. Des tribunaux vont être constitués, mais beaucoup n'auront même pas le droit à un procès, fût-il de pure forme.

Le 25 mai, un épisode particulièrement brutal a pour cadre l'ancien séminaire de Saint-Sulpice, sur la place du même nom. Le bâtiment avait été transformé en ambulance pour accueillir les quelque trois cents fédérés évacués peu avant des baraquements du jardin du Luxembourg. Une compagnie de Versaillais surgit de la rue du Vieux-Colombier, en route vers le Panthéon. Le capitaine fait halte, s'enquiert des occupants. Le médecin de service ne cache pas qu'il s'agit de fédérés, mais qu'étant là depuis plusieurs jours, ils n'ont pu prendre part aux derniers combats. Au même moment un coup de feu part d'une fenêtre du premier étage. Le capitaine se croit pris dans un guet-apens et fait abattre le médecin sous le péristyle. Puis les soldats font irruption dans les salles et commencent à tuer les blessés, à l'arme blanche. Soixante de ces malheureux sont ainsi égorgés, et il faut l'intervention personnelle du général de Cissey, qu'on était allé prévenir, pour faire cesser le massacre.

Le 26 mai, le député Jean-Baptiste Millière, sympathisant de la Commune sans y avoir exercé aucune responsabilité, est arrêté chez son beau-père rue d'Ulm et conduit à l'état-major du 2ème corps d'armée, au palais du Luxembourg. Quand il y arrive, le général de Cissey est en train de déjeuner au restaurant Foyot, rue de Tournon. Averti, le général donne l'ordre de le conduire au Panthéon pour y être fusillé, « à genoux, pour demander pardon à la société du mal qu'il lui a fait ».

Le 28 mai, Eugène Varlin, le relieur élu du 6ème arrondissement, est capturé rive droite. Le général comte de Laveaucoupet, qui a pris part à l'assaut de la butte Montmartre, donne l'ordre de le fusiller à l'endroit où, le 18 mars, avaient été abattus les généraux Lecomte et Clément-Thomas. Une foule haineuse l'accompagne, ne lui épargnant ni coups ni injures, et c'est un homme à moitié inconscient qu'on traîne face au peloton d'exécution.

 

Les procès

Dès le 23 mai sont constituées des « cours prévôtales ». On en compte une vingtaine. Composées de militaires et de policiers, elles fonctionnent dans l'arbitraire le plus absolu : pas d'instruction préalable, ni de débat contradictoire, pas d'avocat pour défendre le prévenu, et aucune possibilité d'appel. En fait, à part de très rares relaxes, elles prononcent deux sortes d'arrêts : la traduction ultérieure devant un conseil de guerre ou la condamnation à mort à prise d'effet immédiate.

L’une d'elle siège au Petit-Luxembourg, au rez-de-chaussée de l'aile gauche. Les personnes arrêtées sont regroupées dans la cour intérieure ou dans les caves. Entre le 24 et le 28, jour de l'écrasement complet de la Commune, ce sont des centaines d'hommes, de femmes et même d'enfants qui sont condamnées. Quasiment aucun acquittement. Dès le verdict prononcé, ils sont « conduits à la queue », c'est-à-dire traînés jusqu'au jardin où ils attendent en une longue file. On les appelle par lots de six, on les aligne contre le mur des terrasses qui dominent la pièce d'eau, face à un peloton d'exécution. Un de ceux qui attendent leur tour et qui en réchappa par miracle avec la complicité d'un soldat compatissant qui ferma les yeux au bon moment, a raconté que, le 25, les exécutions se sont poursuivies la nuit tombée, « éclairées d'un côté par la lune, de l'autre par l'incendie ». On peut se permettre un peu de poésie quand on vient de côtoyer la mort. Les corps restent sur place, arrosés de chaux vive, jusqu'à ce que des charrettes les emportent vers des fosses communes, où les cadavres sont jetés par fournées de vingt. On en a creusé un peu partout, au cimetière Montparnasse, mais surtout au pied des fortifications.

 

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Souvenirs de la Commune. Une exécution dans le jardin du Luxembourg. Gravure Parismuséescollection.

 

Les conseils de guerre

Tous les communards n'ont pas été passés par les armes au terme d'une justice expéditive. Beaucoup ont réussi à se cacher, à Paris ou en province, le temps que retombe la soif de vengeance des premiers jours. Mais dès l'été les arrestations se multiplient, et à leur suite les conseils de guerre entrent en action. Leur nombre a varié, de 4 en juin 1871 à 26 à la fin de l'année. La plupart siègent hors de Paris, principalement à Versailles, mais aussi à Saint-Cloud, Sèvres, Saint-Germain-en-Laye, Rueil, au Mont-Valérien, ou même un peu plus loin, à Chartres et Rambouillet. Deux seulement se tiennent à Paris, à l'hôtel des Conseils de guerre, aujourd'hui disparu, 37 rue du Cherche-Midi.

La relieuse Nathalie Lemel est arrêtée le 21 juin. Elle aurait tenté de se suicider la veille en avalant un demi-litre d’absinthe, désespérée qu'elle était de la défaite de la Commune. Elle comparaît devant le 4ème conseil de guerre, qui siège à Versailles et qui la condamne le 10 septembre 1872 à la déportation et à l'enfermement au bagne de Nouvelle-Calédonie. Elle est conduite à la maison d'arrêt de La Rochelle, où elle reste près d'un an, des amis ayant déposé en sa faveur un recours en grâce. Celui-ci lui est finalement refusé, les autorités militaires étant d'avis « qu'il n'y a pas lieu de proposer une mesure de clémence », selon les termes du rapport de la commission des grâces daté du 23 août 1873, auquel nous avons emprunté ces précisions. Il faut dire qu'elle avait elle-même désavoué l'intervention de ses amis dans une lettre du 7 août adressée au préfet de la Charente-Maritime. Cette lettre semble avoir hâté la décision, car le surlendemain elle embarque à Saint-Martin-de-Ré, sur le Virginie, où elle retrouve Louise Michel et Henri Rochefort. La traversée dure plus de quatre mois. Le 14 décembre 1873, elle est débarquée à la presqu'île Ducos, où se trouve le pénitencier. Elle y partage une cabane avec Louise Michel. Elle bénéficie d'une mesure de grâce avant la loi d'amnistie générale du 11 juillet 1880 et embarque sur le Picardie le 20 juin 1879. De retour, elle s'établit dans le 18ème arrondissement et vit d'emplois modestes, notamment au journal L'Intransigeant. Elle devient aveugle et meurt le 8 mai 1921 à l'hospice d'Ivry où, sans ressources, elle était entrée en 1915. À Paris un arrêté municipal du 8 mars 2007 a donné son nom à la petite place triangulaire formée par l'intersection des rues Dupetit-Thouars et de la Corderie, dans le nord du quartier du Marais.

Bien qu'ayant très tôt pris ses distances avec la Commune dont il réprouvait le radicalisme, le médecin Edmond Goupil cherche à se faire oublier en province. D'abord en Seine-et-Marne, à Marlotte, en lisière de la forêt de Fontainebleau où le 31 mai 1871 il échappe de peu à l'arrestation suite à une dénonciation. Ensuite à Mayenne, auprès de sa famille. Se sachant traqué, il se rend le 3 septembre, espérant par ce geste obtenir l'indulgence des juges. Il est enfermé à la maison de correction de Versailles, en attendant sa parution devant le 4ème conseil de guerre, encore lui. Pour tuer le temps il donne des leçons d'anatomie à ses codétenus. Il est condamné deux fois, d'abord le 19 février 1872 à deux ans de prison, pour sa participation à l'émeute du 31 octobre 1870, puis le lendemain à cinq ans de prison au motif d'avoir été membre, fût-ce de seulement cinq jours, de l'exécutif de la Commune. Comme il le dira plaisamment plus tard, « je fus ministre pendant cinq jours, ça m’a valu cinq ans de prison ! ». La confusion des peines est ordonnée, mais son recours en grâce rejeté le 6 juin. Il est enfermé à la prison parisienne de la Santé. Le 23 mai 1874 sa peine est ramenée à deux ans et il est libéré. S'il ne reprend pas d'activité politique, il reste fidèle à ses amis communards et leur apporte son aide matérielle après leur libération ou leur amnistie. En 1882 il participe à la création d'une association primitivement destinée à l’entraide entre anciens communards, puis chargée d'entretenir la mémoire de la Commune et de ses acteurs. Il la présidera de 1905 à 1918 sous le nom d’Association fraternelle des anciens combattants et amis de la Commune. Il meurt le 19 mai 1920 à Sèvres.

L'éphémère et intègre directeur de la Monnaie Zéphirin Camélinat réussit à se réfugier en Angleterre. En juillet 1872, à Versailles, le 19ème conseil de guerre le condamne par contumace à la déportation. Il est gracié en 1879 et reprend une activité militante dans les rangs socialistes, se faisant élire député de la Seine de 1885 à 1889. Au congrès de Tours qui marque la scission du mouvement socialiste, il opte pour le nouveau parti communiste. Pour la petite histoire, il a été en juin 1924 le premier communiste à présenter sa candidature à l'élection du Président de la République par le congrès : c'est Alexandre Millerand qui l'a, très largement, emporté.

 

Les chanceux

Du fait de sa démission précoce de la Commune (chronique n°11), Albert Leroy n'est pas inquiété.

Si Charles Beslay a bénéficié d'un sauf-conduit pour se réfugier en Suisse (chronique n°11), il n'échappe pas au conseil de guerre. Mais, eu égard à son attitude responsable dans la gestion des réserves de la Banque de France, le 17ème conseil de guerre, qui siège à Versailles, signe le 9 décembre 1872 une ordonnance de non-lieu. Il ne rentre pourtant pas en France et meurt le 30 mars 1879 à Neuchâtel où il s'est établi.

Le cas du docteur Jean-François Robinet est plus ambigu. Certes il avait abandonné son mandat de membre de la Commune dès le 30 mars, mais opposant à l’Empire il proposa d'abattre la colonne Vendôme. Et pendant la « semaine sanglante » il ne se contenta pas de soigner les communards blessés, il aida nombre d'entre eux à échapper aux Versaillais. Sa qualité de membre de la Ligue d'union républicaine des droits de Paris, qui joua un rôle de médiation entre l'Exécutif versaillais et la Commune, explique sans doute pourquoi il échappa aux poursuites, tout comme sa position éminente dans la Société positiviste de Paris.

 

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Le docteur Jean-François Robinet. Photo. Sh6

 

La commémoration

 

Le 6ème arrondissement n'a quasiment conservé aucune trace des événements de la Commune. On peut en citer deux. La première a disparu, la seconde est récente.

La colonne-chapiteau dite « des baisers »

En 1906 le sculpteur Émile Derré (1867-1938) expose au Salon des artistes français une œuvre ayant pour titre « Rêve pour une maison du peuple ». Il s'agit d'un chapiteau à quatre faces, destiné à être dressé sur une colonne.

 

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Le chapiteau des baisers, « Rêve pour une maison du peuple »PhotoSeeberger Frs. Parismuséescollections

 

Le thème en est le baiser, chaque face illustrant quatre moments de la vie : la maternité (baiser de mère), l'amour (baiser d'amour), la consolation (baiser consolateur) et la mort (baiser d'adieu). Pour cette raison, l’œuvre sera plus communément connue sous le nom de « colonne-chapiteau des baisers ». Le lien avec la Commune tient à ce que la face « consolation » représente le visage de Louise Michel embrassant Élisée Reclus, géographe et écrivain socialiste, Communard convaincu, et la face « mort » toujours le visage de Louise Michel embrassant cette fois d'Auguste Blanqui. Le choix de ces modèles se comprend quand on sait que Derré fut proche des milieux anarchistes et représenta en particulier à plusieurs reprises Louise Michel (buste sur sa tombe au cimetière de Levallois-Perret, et statue dans un parc de cette même ville). Sur la partie basse du chapiteau court un bandeau circulaire sur lequel a été gravé : « Parlez, mes douces images, portez l'amour et la tendresse du cœur ».

Après l'exposition le chapiteau fut érigée au sommet d'une colonne dans le jardin du Luxembourg, dans la zone sud-ouest. La colonne-chapiteau fut démontée en 1984, pour laisser la place à l'actuelle statue de Pierre Mendès-France. Déposée dans une cour de la Manufacture des Gobelins, elle suscita l'intérêt de la ville de Roubaix où, après avoir été restaurée, elle fut installée en 1997 sur la place de la Mairie.

Le mercredi 4 juin 2003, Christian Poncelet, président du Sénat, inaugurait une plaque sur le mur bordant la terrasse circulaire du jardin, du côté est. La plaque reproduit une gravure sur bois réalisée en 1871, non signée, intitulée « Souvenirs de la Commune. Une exécution dans le jardin du Luxembourg », et conservée au musée Carnavalet. Elle représente des soldats fusillant des hommes en tenue civile, devant une caisse d'oranger. Certains ont déjà été exécutés, d'autres sont encore debout. Au-dessous on peut lire : « Le Sénat en hommage aux insurgés de la Commune de Paris fusillés contre ce mur le 25 mai 1871 ». Hommage aussi tardif que discret, la plaque ne se remarquant guère. Hommagepartiel aussi, car il se limite aux victimes du seul 25 mai, alors que les exécutions se sont succédé du 24 au 28 mai. L'art des commémorations est décidément bien difficile.

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La plaque en hommage aux fusillés du Luxembourg

 

Ainsi s'achève cette chronique du siège de Paris et de la Commune centrée sur le 6ème arrondissement. Des remerciements tout particuliers sont dus à Christian Chevalier, à qui nous devons la riche iconographie de ces articles. Il a exploité les vastes ressources de notre fonds documentaire, qu'il a ainsi contribué à faire connaître et à mettre en valeur, et il a bien voulu ouvrir pour nous sa précieuse collection personnelle de gravures et illustrations souvent inédites.

 

Jean-Pierre Duquesne

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